La genèse 

Toute personnalité est une tryptique de :

- Force intérieure,

- Appui de l’extérieur,

- Apprentissage

Si une des trois composantes est  « surdéveloppée » ou « sous-développée » on aura à faire face, selon le cas, à une personne manipulatrice ou résiliante. Je vais ré-utiliser une image de la pièce d’étoffe que j'ai introduite dans un précédent article : une image pour souligner la différence entre un manipulateur et un résiliant ça serait de considérer la société humaine sous la forme d'un tissu ou d'un bout d'étoffe. Le manipulateur est un "accroc" qu'on aurait rapiécé, il ne fait pas partie de l'étoffe originelle. Le résiliant est aussi une "anormalité", mais il se présente à la fin sous forme d'un renforcement de la trame de tissu, les fils y sont plus fortement noués les uns aux autres.

Plus la force intérieure est forte et l’appui de l’extérieur faible plus une dynamique vers la résilience prend place. Les résilients possèdent une intelligence de la vie, une faculté d’apprentissage énorme : ce sont des « increvables » au bon sens du terme, ils avancent en tentant de se libérer le plus possible de leur environnement. Ce sont des chrysalides de sang qui se transforment en des papillons capables d’apporter de la joie et du bonheur par la suite.

Plus la force intérieure est faible et l’appui de l’extérieur faible plus une dynamique vers la manipulation prend place. Les manipulateurs possèdent eux-aussi une intelligence mais dans la survie : ce sont des « increvables » au mauvais sens du terme. Ils avancent comme des parasites sociaux mais toujours dépendant de leur environnement. Ce sont des puces qui sautent d’un chien à un autre sans nullement savoir en définitive où leurs sauts les mèneront. Elles ne contrôlent ni le chien ni surtout pas leur besoin de sang. Quoi qu’on puisse dire, ils vivent aux dépends du corps qui les nourrit.

Le parcours ou la dynamique dans la vie

Les résilients ont vécu un traumatisme mais curieusement n’ont pas manqué d’Amour dans leur parcours et notamment leur enfance. La construction intérieure trouve son énergie et sa dynamique dans la confrontation avec un premier élément central dans l’environnement : une figure du sexe opposée. Pour un réfugié par exemple, cela aura trait avec l’intégration dans la terre d’accueil. Cette nouvelle figure féminine jouera le rôle de modèle sain qui va cristalliser l’apport ou la réussite sociale que tentera de renvoyer le résiliant accueilli.

Plus les résiliants souffrent plus ils transforment leur souffrance en bonheur, amour, protection autour d’eux. Ce sont souvent des "radars sociaux", des personnes vers qui l’ont va se tourner lorsque l’on ne sait pas, qu’on doute, qu’on manque d’affection ou d’espoir. On a tous autour de nous ce genre de personnes. Ces gens avec qui on se sent de suite en confiance, capables de s'épancher, qui ne nous jugent jamais, qui donnent d'eux-mêmes sans compter...

Les résilients croient profondément en l’Humain, quoi qu’il arrive ils tendront toujours une main à l’autre. On peut même dire plus on les fait souffrir plus ils donnent consciemment et sincèrement d’eux-mêmes et cherchent à comprendre les autres. Ils ne cessent de construire autour d’eux. Ce sont des personnes douée d’une forte dose d’empathie capable de susciter chez autrui le respect et la recherche d’affection, de protection, de prise de conscience ou d’envie d’ouverture en général. Leur mode de fonctionnement face à la souffrance d’autrui est l’aide, parfois au détriment de soi-même. Voler au secours de l’Autre est poussé par le ressenti de leur traumatisme, qui souvent a été vécu dans leur chair comme la recherche d’une main tendue jamais trouvée à ce moment là.

Face à leur propre souffrance causé par l’environnement ils prennent toujours sur eux-mêmes  jusqu’au moment où ils réalisent qu’ils ne peuvent rien faire parce qu’ils ne comprennent pas, qu’ils ne peuvent rien apporter même en tentant de s’adapter à l’Autre. Ils se ferment alors comme des « huîtres » et reprennent leur route. Ils tendent sans le savoir vers la perfection en s’affranchissant consciemment de toute forme de souffrance. C’est souvent l’Enfant qui sommeille dans l’Adulte qui donne jusqu’à plus raison, ce sont ses émotions qui parlent en société. Ils éprouvent de la compassion jusqu’au plus profond de leurs êtres. Le résilient est un idéaliste sincère, c’est sa seule foi. On pourra le résumer face à la souffrance « apporter par ses actes, ses parole et en derniers recours par ses prières ».

Pour illustrer mon propos sur la résilience, et notamment dans le domaine de la politique, je prendrai l'exemple de Mahatma Ghandi. Il était au tout début de sa carrière de jeune avocat "exilé" en Afrique du Sud, c'est là-bas que sa lutte politique et son évolution intérieure ont commencé, face à l'iniquité des lois de l'Apartheid sous couvert de l'Empire Britannique. C'est en tant que guide spirituel de toute une nation et troisième voie pour l'humanité entière déchirée durant la guerre froide, qu'il a finit son existence.

Les manipulateurs ont vécu eux aussi un traumatisme durant leur enfance mais n’ont jamais reçu d’Amour, plus ils souffrent plus ils communiquent inconsciemment leur souffrance autour d’eux. Pour un réfugié par exemple, l’intégration dans la terre d’accueil peut prendre une tournure différente. Elle peut constituer un modèle malsain qui va être le réservoir de la rancœur ou souffrance non-assumée du manipulateur. La réussite sociale du manipulateur permettra justement son expression.

Les manipulateurs ne croient ni dans l’Amour ni dans le beau chez l’Humain. Face à leur propre souffrance, ils projettent sur autrui leur besoins, leurs frustrations et leurs souffrances. Ils ne l’assument pas. Ils prennent d’une manière morbide des autres jusqu’au moment où la personne d’en face n’est plus dupe. Ils tentent alors par tous les moyens de garder le contrôle jusqu’au bout, ils « explosent » comme des tornades et reprennent leur route. Leur mode de détachement c’est la fuite après l’esclandre. Ils sèment destruction et désolation. Ils tendent vers la perfection en restant esclave inconscient de toute leur souffrance. C’est souvent l’Enfant qui sommeille dans l’Adulte qui veut obtenir par autrui qui n’arrive pas à se libérer de ses peurs, de ses démons, de ses angoisses, etc.

La confiance en soi chez le résilient ou le manipulateur est importante, comme le sont aussi une bonne scolarité, la capacité d’apprendre et de résoudre des problèmes et l’aptitude à entretenir de bon rapports humains (en profondeur ou en façade que l’ont soit résiliant ou manipulateur). Je soulignerai que ce qui lie les deux concepts c’est cette puissante faculté de reconnaître, d’identifier, de mettre les mots, de caractériser ce qui constitue le récurrent chez l’Humain ou l’ontologique : ce qui est au-delà du langage et de ce qui est. Chez le résilient cette identification aura comme but la volonté profonde de développer en soi et autrui la construction personnelle et de l’épanouir, chez le manipulateur ça sera dans un but de contrôle sur l’autre ou de destruction. Le premier souffrira de "sur-identité" d'avoir vaincu sa souffrance et aidera les autres à s'en libérer, l'autre de "sous-identité" de n'avoir jamais su se libérer de sa souffrance et de la reporter sans cesse sur autrui.

Pour illustrer mon propos sur la manipulation, et notamment dans le domaine de la politique, je prendrai l'exemple d'un personnage hors-normes aussi : Henry Kessinger. Exilé durant sa petite enfance aux états-unis avec ses parents réfugiés d'Europe centrale, ayant fuit l'horrible traumatisme de l'Holocauste. Homme politique ayant influencé les actions stratégiques de son pays pendant des décennies et curieusement jamais élu au suffrage universel ! son évolution dans l'appareil d'état américain n'a d'égal dans le côté sombre et obscur que les exactions grandissantes de son pays en Amérique du Sud ou en Asie. Il est clair que ne s'étant jamais libéré de sa souffrance, le credo de ce personnage est "la fin justifie les moyens". Pour croiser l'histoire des deux exemples d'"hommes politiques, Ghandi aura contrôlé et évacué sa souffrance en se contrôlant parfaitement lui-même. Kissinger aura  toujours été esclave de la souffrance transmise par ses parents et aura tenté toute sa vie de calmer ses démons en contrôlant les autres. Pour la petite histoire Ghandi avait comme habitude de dormir avec des jeunes vierges dans son lit. Maintenant je commence à entrevoir le pourquoi de la chose... cette quête éternelle de perfection...

A quoi rapproche-t-on le concept dans d’autres disciplines ?

Le concept de résiliant/manipulateur se retrouve dans d’autres disciplines notamment la théorie de la décision ou les techniques de marketing. Dans la théorie de la prise de décision on parle de « stakeholder », « points d’appuis » ou « parties prenantes ». ce sont les acteurs d’une prise de décision capables de dépasser des situations de blocage (personnes vers qui l’ont se tourne) ou d’introduire des normes (de comportement notamment). On peut dire que les concepts de résiliants/manipulateurs peuvent être étendus à toutes les disciplines ayant trait à l’humain (sciences de gestion, théorie de l’organisation, sciences économiques, sciences politiques etc.).

Il faut dire que les différents modes de communication permettent aisément d'identifier les résiliants/manipulateurs. Malheureusement, ce sont uniquement les acteurs de la manipulation commerciale qu'on sait identifier parfaitement à l'heure actuelle. On parle selon le jargon métier de "faiseurs d'opinions", de "créateurs de modes", de "déclencheurs de rumeurs"... à quand cette identification des résiliants grâce aux TIC ?